Changement climatique
Décarboner l'agriculture française
Décembre 2024
La stratégie nationale bas-carbone a pour objectifs d’atteindre la neutralité carbone en France en 2050 et de réduire l’empreinte carbone des Français. Elle fixe des budgets carbone, objectifs d’émission de gaz à effet de serre à ne pas dépasser, par période de 5 ans. Pour l’agriculture, cette stratégie demande de réduire de 46% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 par rapport à 2015.
Un scénario de décarbonation a été publié par le groupe de réflexion The Shift Project pour permettre de passer de 82 millions de tonnes d’équivalent CO2 (Mt éqCO2) d’émissions directes en 2020 à 48 Mt éqCO2 en 2050. Dans ce scénario, l’agriculture stocke du carbone (16 Mt éqCO2) alors qu’elle en déstocke 10 Mt éqCO2 aujourd’hui.
Les principales conséquences de ce scénario pour l’agriculture française sont :
- Une forte augmentation des surfaces de protéagineux qui sont multipliées par 2.3. Les surfaces de soja sont quant à elles quadruplées. Les surfaces de céréales baissent de 17%. Les modifications de cheptel en élevage permettent à une part de la sole de céréales d’être réorientée vers d’autres débouchés dont l’exportation. La France continue ses exportations notamment de céréales dans ce scénario.
- La production de fruits et légumes augmente pour réduire les importations. Les surfaces irriguées augmentent de 25%. Les volumes d’eau nécessaires pour l’irrigation augmentent de 32%.
- Les volumes d’engrais minéraux azotés sont réduits de 70%. Cette réduction serait permise par l’augmentation de la sole de légumineuses/protéagineux, le développement de la méthanisation et l’utilisation des digestats, le recours accru aux couverts végétaux et la meilleure utilisation de l’azote organique.
- L’agriculture devient autonome en énergie décarbonée. Les moteurs thermiques transitent vers l’électrique, le biogaz et les biocarburants. La méthanisation se développe fortement (30 Mt de matière sèche sont orientés vers ce dispositif contre 1 Mt aujourd’hui). Le photovoltaïsme et l’agrivoltaïsme n’ont pas été intégrés au scénario.
- Le stockage de carbone est principalement obtenu grâce aux couverts végétaux dont la surface est multipliée par 8. L’agroforesterie intraparcellaire, la plantation de haies, l’enherbement des vignes et vergers interviennent également mais dans une moindre mesure.
- A noter également que le scénario table sur une augmentation des surfaces en semis direct ce qui permet de réduire la consommation d’énergie des engins agricoles et de stocker du carbone.
Ce scénario doit permettre de nourrir 112 millions de personnes (sans modification de régime alimentaire) et de réduire les consommations d’énergies directes (-20%) et indirectes (-55%) de l’agriculture française. Ce scénario est une vision de ce que pourrait être le paysage agricole français demain. Il est bien sûr soumis à de multiples aléas et mesures incitatives pour orienter les changements à effectuer.
Le projet 4 pour 1000
Stocker du carbone dans le sol pour compenser les émissions de CO2 dans l’atmosphère, tel est l’objet du projet 4 pour 1000 lancé en 2015 lors de la Conférence de Paris sur le Climat. L’idée de base est simple : si l’on augmente chaque année de 4 ‰ le stock de C des sols de la planète dans l’horizon de surface (0-30 cm), on compense nos émissions de CO2 et on atténue le changement climatique. L’INRA vient de publier les résultats d’une étude sur le potentiel de stockage en France et son coût.
Le label bas-carbone
Le label bas-carbone, mis en place par le Ministère de la Transition écologique et solidaire, sert à labelliser des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre et séquestration du carbone. Il permet un financement des projets par des entreprises, des collectivités, des particuliers en garantissant à ces financeurs la qualité du projet.
La contribution des cultures intermédiaires au stockage du carbone
Les cultures intermédiaires ont été préconisées à la base pour servir d’engrais vert et limiter les fuites de nitrates vers les nappes phréatiques. A l’heure du changement climatique, l’agriculture est émettrice de gaz à effet de serre mais elle contribue également à réduire les émissions de ces gaz en stockant du carbone dans les sols. Les cultures intermédiaires sont une pratique favorable au stockage de carbone dans le sol.
Haies et changement climatique
L’agriculture subit les conséquences du changement climatique (sécheresse, fortes précipitations, températures élevées…). Limiter les impacts de ce changement va dépendre de la capacité des systèmes cultivés à supporter les évènements climatiques extrêmes et de notre capacité à stocker du carbone. Dans ces 2 cas, les haies ont un rôle à jouer.
Quelles pratiques pour combiner lutte contre le réchauffement climatique et qualité de l’eau?
En France, l’agriculture est responsable de 19% des émissions nationales de gaz à effet de serre (GES). Si l’agriculture est émettrice de GES, elle a l’intérêt de pouvoir également stocker du carbone et donc de compenser une partie des émissions de CO2. Que ce soit pour limiter le réchauffement climatique ou agir pour la qualité de l’eau, un seul objectif : réduire les pertes en carbone et azote.